Pierre Migeon II (1701-1758) Bureau de pente en marqueterie de Bois de Violette époque Louis XV

Pierre Migeon II (1701-1758) Bureau de pente en marqueterie de Bois de Violette époque Louis XV

 

Les meubles estampillés de Pierre Migeon II sont rares sur le marché de l’Art, les amateurs sont plus habitués à pouvoir les admirer dans les Grands Musées ou dans les Grandes Collections.

 

Nous vous proposons un très beau bureau de pente toute face, exécuté au début de l’époque Louis XV vers 1730-1740. Le placage de bois de violette monté sur un bâti de chêne est d’une superbe qualité, les figures géométriques en « Ailes de Papillon » de la marqueterie sont caractéristiques de cet excellent ébéniste.

 

Un élégant bureau de pente toute face, en marqueterie de bois de Violette en ailes de papillon monté sur chêne. La partie haute ouvre par un abattant gainé d’un beau cuir de couleur tilleul (neuf) à décor doré à la feuille d’or à la roulette, découvrant un théâtre à gradin à six tiroirs mouvementés et un casier central. L’abattent reste en position écritoire au moyen de deux tirettes en fer forgé. 

La partie basse reposant sur quatre beaux pieds mouvementés, propose quatre tiroirs en façade. Ce bureau à pente a été pensé pour trôner au milieu d’une pièce, il pourra ainsi faire admirer la partie arrière tout en placage de bois de violette du plus bel effet décoratif.

Belle ornementation de bronze ciselé et doré.

 

Très beau et rare travail français d’époque Louis XV estampillé par Pierre II Migeon vers 1730-1740.

 

Dimensions : Hauteur 99 cm – Longueur 81 cm – Profondeur 44 cm.

 

En excellent état, notre bureau a été revu dans nos ateliers et à reçu un beau vernis au tampon. Il est garni à neuf d’un cuir décoré de couleur tilleul.

 

Biographie :

 

Pierre II Migeon (1701-1758), fils et successeur de Pierre I Migeon, eut encore plus de renommée que son père.

 

Né en 1701, il épousa une demoiselle Orry ou Horry qui lui donna un fils unique et mourut en 1734. On ignore la date de son accession à la Maîtrise que l’on situe entre 1721 et 1725, les registres datant de la Régence ou du début du règne de Louis XV n’ayant pas été conservés. A la fin de l’année 1730, sans doute après la mort de son père, il reprend l’atelier familial et le magasin de meubles qui en dépend, ou on le trouve établi comme fabricant et marchand de meubles, rue de Charenton, vis-à-vis le couvent des Dames anglaises, déjà nanti d’une honnête aisance et propriétaire de l’immeuble où il travaillait.

 

Les Archives de la Seine conservent un gros registre soigneusement écrit de sa main, dans lequel il mentionna depuis cette époque tous les payements faits à ses fournisseurs, avec l’adresse de chacun d’eux, souvent la liste de leurs ouvrages et parfois les noms des personnes qui en avaient passé la commande. On devine l’intérêt d’un tel recueil. Malheureusement ce volume nous est parvenu dans un état déplorable, ayant beaucoup souffert de l’humidité et des rats. La première page porte un préambule d’une piété touchante. Notre artisan y parle avec tendresse de son fils, auquel il espère laisser un peu de bien acquis de bonne foi. Il implore le secours du ciel pour mener son commerce avec probité, sans jamais faire tort à ses ouvriers, ni manquer à la confiance de ses clients. « C’est pourquoy, dit-il, pour l’ordre de mes affaires, en cas que Dieu dispose de moy, je commence ce registre pénétré de ses divines bontés, le priant de toute mon âme de m’accorder sa sainte grâce afin que je puisse être éternellement heureux. Ainsi soit-il ».

 

La Providence favorisa les entreprises de ce brave homme. Il fut bientôt appelé à travailler pour le Roi. 

Dès 1740, l’intendant des Menus lui commandait un « bureau de musique » en bois d’acajou, portant sept pupitres et des chandeliers dorés. 

Il devint ensuite un des fournisseurs du Garde-meuble. Peut-être eût-il cette distinction grâce à l’appui de Mme de Pompadour qui passait pour lui témoigner une bienveillance particulière. Le marquis d’Argenson écrivait dans ses Mémoires le 12 mai 1749 : « On crie de tous côtés contre la maîtresse ; de tous côtés il revient des traits de son crédit et des prodigalités royales. Migeon, ébéniste du faubourg Saint-Antoine, vient d’avoir 3000 francs de pension pour avoir fait une belle chaise percée à ladite Marquise ». Nous ne sommes pas obligés de croire sur parole le mordant chroniqueur ; mais sa boutade sur la chaise percée de la marquise mérite d’être retenue. Migeon acquit en effet une véritable célébrité par le talent avec lequel il fabriquait ce genre d’ouvrages.

En 1747, il avait envoyé à Marly, précisément pour la favorite, une encoignure de bois violet, bombée et chantournée, qui renfermait une chaise d’affaires, un réservoir et deux compartiments garnis de tapis bleu. Il construisit depuis lors tous les fauteuils de garde-robe nécessaires à la Cour. Les plus perfectionnés étaient munis d’un système mécanique fonctionnant par des manivelles placées dans les bras. Ceux qu’il fournit à Mesdames de France comportaient des carreaux et manchettes en velours de couleurs différentes : bleu pour Madame Adélaïde, jaune pour Madame Victoire et rouge pour Madame Sophie. 

 

D’autres sièges analogues faits par ce maître furent envoyés en Italie à Madame Infante, duchesse de Parme.

 

Migeon avait encore la spécialité des meubles de fantaisie, tels que les bibliothèques contenant un jeu d’eau pour servir de lave-mains, les toilettes et bureaux de voyage, les petits secrétaires machinés à culbute, les tables pliantes en ciseaux, les plateaux à cabaret. Il produisait aussi, comme son père, de luxueux ouvrages en laque et en bois de rapport. 

 

Le prince de Soubise le fit concourir aux embellissements de son hôtel à Paris. 

Il livra des meubles à Claude Glucq, conseiller au Parlement, pour le château de Villegenis, qui fut acheté en 1744 par la princesse Louise-Anne de Bourbon-Condé, dite Mademoiselle de Sens. 

Avec les maréchaux de Brancas et de La Fare, il comptait au nombre de ses clients les chanceliers d’Aguesseau et de Lamoignon, le lieutenant général de Caraman, le comte d’Usson, l’abbé de Gouffier, la présidente de Bandeville, etc. 

 

Il s’était attaché des correspondants en province et même à l’étranger, dans la Belgique et la Hollande. L’importance de ses affaires ressort de ce détail que son répertoire mentionne plus de deux cent cinquante commerçants et ouvriers qui pourvoyaient son magasin. On relève parmi leurs noms ceux des ébénistes Criard, Landrin, Dautriche, Bircklé, Canabas, Macret, Peridiez ; des vernisseurs Régnault et Boutry; des menuisiers en meubles Saint-Georges, Letellier, Lerouge ; des sculpteurs sur bois Durillon et Lecolle ; des fondeurs Leriche, Delamarre, Pinetot, Gastellier ; des doreurs Dautant, Trudelle, Saint-Leu et Fagard.

Migeon laissait sa maison en pleine prospérité lorsqu’il succomba, le 4 septembre 1758, « à la suite d’une inflammation du bas ventre dont il étoit attaqué depuis huit jours ».

 

Ce maître employait l’estampille MIGEON, imprimée en grandes lettres, avec l’N à contresens.

Plus scrupuleux que beaucoup de ses confrères, il semble n’avoir signé que ses propres ouvrages, à l’exclusion de ceux dont il s’approvisionnait au dehors. Deux raisons portent à le croire : le nombre restreint de pièces frappées de sa marque, et leur style généralement bien distinct. Peu d’ébénistes ont traité le genre rocaille avec tant de liberté et de hardiesse.

 

Musées et Collections :

 

Son œuvre capitale se trouve au musée du Louvre. C’est le fameux bureau historique, dit de Vergennes, qui a longtemps servi aux ministres des Affaires Étrangères.

Au musée des Arts décoratifs, cet ébéniste est représenté par deux commodes d’une époque plus tardive, la première en marqueterie à fleurs, la seconde en laque noire. On observe son poinçon sur une autre commode en marqueterie, dans le mobilier de Chaalis légué à l’Institut par Mme Édouard André. L’ancienne collection Lefrançois, à Rouen, renfermait une pièce analogue, ornée de cuivres aux armes du Dauphin. Citons encore, comme exemples de ses travaux, le grand secrétaire à décor de motifs contournés qui dépendait de la succession de l’antiquaire L. Lévy, le bidet de luxe que possédait naguère M. Beurdeley, et surtout une table-liseuse ayant paru à la vente Chasles, ouvrage bien représentatif de la manière du maître avec ses formes galbées en tous sens et ses pieds très arqués.

 

Musée de Beauvais : Petit bureau plat en placage de bois de rose et d’amarante, marqueté de fleurs sur la ceinture et sur les pieds.

 

Château de Champs sur Marne : table de toilette ou coiffeuse Louis XV de forme rognon en placage de bois de rose.

 

Château de Fontainebleau : Table à sextuor Louis XV en acajou, avec pupitres et pieds galbés à tablettes d’entrejambes, porte-flambeaux en bronze.

 

Lyon, musée des Arts-Décoratifs : Commode Louis XV à deux tiroirs sans traverse, en bois de rose et bois de violette, marqueterie de branchages encadrés de rinceaux.

 

Musée des Arts décoratifs Paris : Commode Louis XV à deux tiroirs sans traverse, ornée de vernis à décor polychrome dans le gout chinois. Commode Louis XV à deux vantaux, marqueterie de branchages fleuris encadrés de rinceaux sinueux sur fond de satiné, entourage de bois de violette.

 

Musée Carnavalet Paris : Commode Louis XV à deux tiroirs, chutes d’angle à espagnolettes en bronze. 

 

Petit-Palais Paris : Table liseuse Louis XV à dessus amovible formant table de lit, marqueterie de grillages en bois de violette, amarante et satiné, pupitre ajouré, deux bougeoirs en metal.

 

National Gallery of Art Washington : Petit bureau Louis XV à très faible pente, en placage de satiné marqueté de rinceaux d’amarante.

 

Residenzmuseum Munich : Paire d’encoignures Louis XV galbées à une porte, base saillante, marquetées de fleurs en bois de bout, encadrements de bronzes rocailles.

 

Château de Versailles : Table à écrire à transformation Louis XV

 

Le Louvre : Bureau plat dit de Vergennes

 

Victoria and Albert Museum.

 

Wallace Collection.

 

Bibliographie :

 

Le Mobilier Français du XVIIIème Siècle – Pierre Kjellberg – Les Éditions de l’Amateur – 2002.

Les ébénistes du XVIIIe siècle – Comte François de Salverte – Les éditions d’Art et d’Histoire – 1934.

Migeon – André Boutemy – Connaissance des Arts, n° 83, janvier 1959, p. 66-73.

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